VIVRE (VRAIMENT) A LA CAMPAGNE -BIS-

Par hasard, je viens de relire un post du 12 août .... de quelle année ???  .......  je viens de trouver c est 2008 .. trois ans déjà et je suis toujours aussi  énervée par les mêmes articles et reportages . De la même façon, quand un abruti découvre l écologie et nous enjoint de nous déplacer à vélo ... ben oui, 20 à 30 kms aller retour en vélo pour aller se ravitailler c est une excellente idée .... et pour aller travailler aussi ... surtout si l on emmène des clients en visite .....

Bon, revenons à ce post .

Je le trouve encore et encore très pertinent (ben oui, à l occasion de mon anniversaire, j ai décidé de me faire des compliments ....) et donc pour les nouveaux lecteurs (et une petite révision pour les autres ...) revoici le bébé :

Morte de rire (jaune) et carrément hors de moi,  lorsque je vois dans des magasines, des reportages sur "ceux qui ont choisi de vivre à la campagne". Photo de monsieur et madame (ou madame seule tout dépend ), souriants devant leur très belle maison de pierre ou leur "fermette rénovée" , au milieu de massifs de fleurs superbes et d arbres taillés au cordeau. Souvent Madame, élégamment vêtue d un pantalon blanc ou d une petite robe "toute simple tendance fermière", tient à la main un sécateur ....

Pourquoi pas un reportage  intitulé " travailler à Paris" qui montrerait un joli golden boy, souriant de toutes ses fausses dents, nonchalamment installé sur l 'aile de sa Porsche, jouant avec son téléphone dernière édition, lunettes et montres "bling bling" pour décrire la vie des travailleurs parisiens .... je vois d ici la tête de tous ceux qui se coltinent le métro qui pue, le petit chef qui hurle, le bruit et la pollution ambiante, les salaires de merde ...

Alors, si vous avez envie de vous installer vraiment à la campagne pour y vivre (pas pour vous glisser le temps d un week end dans la peau de Marie Antoinette déguisée en bergère)  sachez qu il va vous falloir changer de vision ; tous ceux qui ont choisi ce mode de vie vous le diront : à moins d avoir le budget nécessaire à l emploi de personnel multiple et varié (bûcheron, faucheur, maçon, couvreur, peintre, etc etc..), il faut d abord savoir retrousser ses manches et s'entrainer à traduire certaines périphrases couramment utilisées  :

Ah !! se chauffer au bois !! bonheur d une cheminée odorante aux buches craquantes  réchauffant délicieusement votre maison pour presque rien
traduction : le bois il faut le trouver, soit être capable de le couper en forêt (à condition d avoir ou de louer une forêt) de le tronçonner et de le ranger, soit de l acheter à un habitant possédant les dites forets ....  qui va vous faire payer très cher votre amour de la cheminée ... et vous livrer le tout en vrac dans la cour et de préférence devant la porte d entrée . Pour peu que vous rentriez tard dans la soirée (parce que à la campagne aussi on sort parfois le soir !!) vous vous retrouvez à créer un tunnel d accès à la porte au milieu des buches et ceci à la lueur des phares (et si vous oubliez ensuite de les éteindre, vous aurez le plaisir le lendemain de vous confronter avec le chargeur de batterie mais cela est une autre histoire) Ensuite, il faut ranger le bois et c est lourd !!!
Et puis il faut allumer la cheminée , tout un art : surtout avec des buches de 1,20 m !! z avez intérêt à faire provision de petit bois, cageots (à ramasser sur les marchés : cela vous permettra très vite d être assimilé à un pauvre hère vivant de la mendicité des commerçants !!), pommes de pin ( à faire sécher impérativement pour ne pas subir le sort des jambons)
Et espérer que les vents seront favorables parce que, sinon, c est l enfumage assuré et le bonheur de devoir ouvrir toutes les fenêtres pour chasser la fumée qui pique les yeux et fait pleurer les enfants !! donc, il fait - 10 ° dehors et même température chez vous avec des courants d air en plus !!
Bien évidemment, le bois et la cendre de cheminée laissent des souvenirs, donc  inutile de compter avoir un joli parquet bien ciré et un tapis précieux, sans prendre le risque de gros trous noirs dans le tapis (projection de braise) et poussière de cendre recouvrant bibelots et parquet.
De plus, le bois est stocké à l extérieur et  il faut aller le chercher pour alimenter le feu,  donc, en pleine nuit et par température extra basse, enfiler un anorak, des bottes, une lampe frontale et hop, charger les bûches. Alors si vous imaginiez la soirée en nuisette et pyjama de soie..... z'allez être déçus.

Ah le bonheur de consommer ses propres légumes et produits divers
Traduction : avoir des poules qui pondent de bons œufs frais : préparer le poulailler, le nettoyer souvent, ne pas oublier l eau et les graines, ne pas compter conserver de jolis massifs fleuris (les poules ne comprennent pas la différence entre pissenlit et orchidées) , savoir que la poule ne pond pas tout le temps et très rarement à l endroit prévu pour cela . Donc, chercher les œufs dans des endroits divers et avoir la surprise d y trouver un poussin (les poules ne pondent pas d œufs datés !!), savoir également que les renards adorent les poules et qu en une nuit, leur passage peut ramener vos espoirs à zéro . Idem pour les canards, oies etc qui, de plus, nécessitent une mare ou tout point d eau leur permettant de patouiller toute la journée ..
Bien entendu, tous les soirs, traquer les bestioles pour les faire rentrer dans leur maison. Cela peut etre très drôle un soir mais quelque peu agaçant, tous les soirs, de devoir les appeler (non, le ridicule ne tue plus depuis longtemps) puis les compter et s apercevoir qu il en manque au moins une. Et repartir à sa recherche en poussant les mêmes cris ridicules que précédemment ... Eviter de laisser ressortir les unes en voulant faire entrer la dernière .

Avoir des lapins ; yess !!! et les nourrir ! donc soit cueillir les pissenlits et autres herbes appréciées par ces bestioles (et ça bouffe !!! ) soit leur acheter des "granulés" et se poser la question de l intérêt de nourrir ses propres lapins de la même façon que le sont les lapins d élevage . Ensuite, il faut les tuer et les dépouiller .... je n entrerai pas dans les détails pour épargner des âmes sensibles mais cela peut très vite tourner au rodéo lapinesque et à la scène de crime, si on ne connaît pas les gestes précis et si on ferme les yeux pour ne pas voir le massacre !! 

Plus simple, en apparence, les légumes ... Faut d abord préparer le sol : désherber, labourer puis semer et/ou planter . Au bon moment, qui n est pas le même selon les espèces et les localisations. Se réveiller le lendemain en imaginant le plaisir de regarder SES plants de salades bien verts, chercher, ne rien trouver ... limaces, escargots ou lapins, chevreuils aiment beaucoup les feuilles tendres ... vous avez quitté le stress du bureau et de ses horaires , vous allez connaître le stress du jardin et de ses prédateurs ... inutile d envisager une garde 24h/24, vous ne tiendrez pas longtemps ... les appâts et autres tue-limaces, tuent également votre chien, chat et parfois vos enfants ... les trucs divers et variés (bière : non, cela tue les hérissons, cendre qui disparaît à la première pluie, fil de cuivre.....etc....) vont vous permettre de jouer au jardinier ....
En ce qui concerne votre consommation familiale, envisagez  le marché  (ou souvent, vous  verrez le pépé du coin vendre tranquillement des légumes en provenance directe d.... Espagne ou d ailleurs)

Vous devez penser que je renie ce que j ai toujours écrit : c est un vrai bonheur de vivre ici, en milieu rural, en pleine nature. Je ne renie rien, je suis toujours aussi heureuse de mon choix, seulement les images idylliques me font grincer des dents et me paraissent dangereuses pour tous ceux qui envisagent ce type de vie.

Je parle ici de vivre vraiment en pleine nature, pas de vivre dans un village avec un jardin de 500m2 et tous les commerces proches .

Chez moi, il fait parfois très très froid, les routes alors sont bloquées et l électricité parfois,reste coincée par les glaçons.
Donc, il est nécessaire d avoir sous la main , éclairage et chauffage d appoint (prêts à l emploi  c est à dire avec du combustible ) réserve alimentaire (pour les chiens aussi) . C 'est à dire prévoir et s 'organiser . Ce n est pas lors du premier flocon de neige qu il faut aller se ravitailler, sinon c est prendre le risque de rester coincé sur la route avec le ravito dans le coffre et l ensemble dans un fossé enneigé. En deux heures, une route normale devient impraticable pour peu que le gel soit de la partie;
Parfois, il faut patauger dans la neige ou la boue . Souvent il faut bricoler, réparer .... Ne pas craindre la solitude. (accros de la télé s abstenir sauf à acheter un groupe électrogène), déboucher un fossé envasé, tronçonner des branches tombées, ne pas avoir peur de l'orage et/ou des araignées.....

Souvent, aussi, regarder la beauté de la nuit, écouter le silence, épier les chevreuils dans le pré, apprécier la légèreté des libellules bleues, connaître le bonheur à l'état pur  !

Tout ce laïus pour dire : si vous rêvez devant les magasines, réfléchissez avant de balancer votre démission à votre boss, mettre en vente votre appartement et plonger dans la vie paysanne, en revanche si vous préférez les bottes en caoutchouc aux talons hauts et  l'odeur des vaches à celle du métro, si vous êtes capable d'appréhender la nature dans ce qu elle a parfois de difficile à vivre (sa cruauté parfois .. les animaux se mangent entre eux, sans état d âme)  et si vous êtes amoureux inconditionnel de la beauté des choses ... alors, n hésitez pas .. changez de vie et bienvenue au club !!!

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Et vous ??? vous avez changé de vie ?? racontez moi

Comments

[Christelle]

Pourquoi prendre des buches de 1.20 m ? en 50 cm çà peut etre stocké en vrac sous une bache ( bon,pas devant la porte la livraison ...),çà rentre dans la brouette pour en tentrer d'avance dans la maison ...d'accord,plus c'est coupé petit ,plus c'est cher ... :-( mais bon , c'est pas sur des trucs comme çà qu'il faut économiser ;-)

[diedouchak]

pas encore changé de vie, mais on s'y prépare...
avec patience, impatience et prudence

[Ziggie]

J'ai "changé" radicalement de vie en 1995.

Je me retrouve complètement dans ce que tu dis, sauf que je n'ai ni poules (renards), ni lapins, ni jardin à cause du sous-sol (pays schisteux, anciennes ardoisières).

L'hiver dernier, nous sommes restés isolés plus de 10 jours à cause de la neige. Dans les campagnes perdues, les routes ne sont jamais dégagées.

Oui, il faut tout prévoir, réserve de bois, de bougies, de ravitaillement et tant d'autres choses auxquelles on ne pense pas avant qu'elles ne manquent.

Dans le bout de Finistère où je vis, il pleut énormément et il fait plutôt frais depuis quelques années. L'été est de plus en plus une vue de l'esprit.

Même si je connaissais à l'avance une grande partie des difficultés que je serais amenée à rencontrer, je me dis que j'étais encore très loin de la réalité et il y a des jours, où malgré la beauté, la flore, la faune et la relative préservation de la nature :
J'EN AI MARRE.

Première grande surface (on est bien obligé d'y aller) à 25 km. Il ne faut pas être malade non plus, le premier hôpital est à 51 km.

Il y a des jours où j'angoisse complètement, où je me dis : comment ferai-je dans quelques années ?

Je suis très contemplative et un rien me ravit (ce matin j'ai vu un gros bourdon entrer à l'intérieur d'une capucine un peu légère pour lui, tomber au sol, se remettre en s'auto-frictionnant, recommencer, retomber... des oiseaux plonger dans le kayak rempli de pluie du fils aîné parti ailleurs).

Les chevreuils, les renards, les étoiles (quand on peu les voir) les lunes diverses et variées, la forêt, les lacs, les chemins, me comblent parfois d'une joie inexprimable.
Découvrir une plante carnivore dans une tourbière m'est offert comme quelque chose d'interdit.

Mais il y a tout le reste. La solitude en fait partie (j'ai un mari qui a 25 ans de plus que moi et ce n'est pas toujours facile à vivre).

Pour autant, je me sens un peu décalée en ville, j'ai l'impression d'avoir l'étiquette "bouseuse" collée au front quand je retourne à Chartres, ma ville natale.

Alors ?

Je ne sais pas.

"A la recherche du temps perdu" ou d'un autre à trouver.

Bien à toi.

[dodovanille]

Je viens de passer un bon moment à te lire!! Tout est vrai, je le confirme!! Les hivers coincés sans voir âme qui vive sauf les lapins, les quelques oiseaux..Les stères de bois qui doivent être rangés correctement sinon, gare à la débandade et re-re recommencer, et puis, pas de beaux vêtements quand il va falloir, dégager l'entrée du garage en plein hiver, ça glisse et zou on se casse la figure..Puis, zut alors, plus de lumière, où sont les bougies ??? Croiser les doigts pour que Monsieur EDF rétablisse vite l'electricité, autrement, foutue la nourriture au congélateur... Mais quel bonheur de déjeuner porte grande ouverte, avec fonds sonores le piaillement des oiseaux, les tourterelles, des pigeons ramiers, l'autre jour nous avons même eu droit à la visite d'une fouine!!!
Les magazines embellissent souvent la réalité....C'est ce qui fait vendre....
Bon dimanche

[Iza]

J'ai changé de vie, pour moi mais aussi pour mes enfants : nous avons quitté la Seine St-Denis pour l'Yonne, dans un petit village. Personnellement petite, j'ai connu la toilette à l'eau froide parce que la maison n'avait pas l'eau courante ni le chauffage central, les coupures d'électricité au moindre orage, alors je ne suis pas très difficile. Par contre, je n'ai toujours pas trouvé de travail dans le coin... alors je vais bosser à Paris tous les jours et ça fait beaucoup. Mais bon, j'habite un bel endroit et mes filles sont ravies d'habiter un petit village, alors je suis ravie aussi. Et puis qui sait ce qui peut se présenter un jour !